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Usages Publics du Passé

Usages Publics du Passé

Maddalena Carli ©

Lorsqu’on est confronté à une ville pétrie de témoignages du passé, on a du mal à associer le terme « ruine » aux bombardements de la Seconde guerre mondiale. En effet à Rome, le mot évoque plutôt les Forums et le Colisée, les thermes et les mausolées, ce patrimoine artistique exceptionnel qui émerveilla les soldats anglais et américains à la Libération le 4 juin 1944 et qui n’a jamais cessé de subjuguer touristes et visiteurs de toutes nationalités.

Alberto Cavaglion ©

Le 25 avril dernier, date de la Libération du fascisme en Italie, fut un jour amer. Les pages des journaux ont été dominées par le mouvement populiste 5 stelle de Beppe Grillo, mais également par la parution de deux ouvrages sur le « vilain secret » du partisan Primo Levi, pour reprendre les deux mots incisifs par lequel lui-même, devenu écrivain, qualifie la chose. Drôle de coïncidence. N’est-il pas étrange qu’à quelques semaines d’intervalle seulement, deux livres cumulant plus de 800 pages soient consacrés au même épisode de la vie de l’écrivain de Turin ? Une soi-disant « histoire inédite passée sous silence » (Sessi, 2013 ; Luzzato, 2013).

Marcello Flores ©

« C’est comme si Luzzatto avait eu le besoin d’utiliser contre Primo Levi la théorie de la ‘zone grise’, que celui-ci avait magistralement théorisé dans Les naufragés et les rescapés, en la réduisant à une métaphore usée sur les nuances infinies entre le blanc et le noir ». Avec ces mots, Gad Lerner a ouvert, dans la Repubblica, la polémique contre l’ouvrage de Sergio Luzzatto, Partigia. Una storia della Resistenza, qui vient de paraître chez Mondadori.

Isabelle Ullern ©

L’article qui suit s’engage circonstanciellement dans la controverse déclenchée par un livre d’un historien italien, Sergio Luzzatto, paru au printemps 2013. Ainsi que le montre un de ses contradicteurs, sur le site des usages publics du passé puis dans la presse italienne, Alberto Cavaglion : au motif de désacraliser l’histoire et les figures héroïques de la fondation de la république italienne, ce livre s’autorise d’une interprétation réductrice, déplacée, et moralisatrice de l’écriture du témoin survivant, Primo Levi.

Olivier Abel ©

L’affaire Dieudonné est certainement une baudruche, dont plus personne bientôt ne parlera plus, mais à son occasion nous pouvons réfléchir sur quelques évolutions récentes du paysage de l’opinion publique. Depuis les Lumières, nous vivons dans un monde où la société civile doit prendre la place des églises. J’entends ici par société civile une société où la liberté d’opinion est la règle.

Marc Olivier Baruch ©

Replaçons-nous quelques années en arrière. Comme, pour le meilleur et le moins bon, je lis Le Monde tous les jours, il n’y avait pas de raison que, le 19 décembre 2006, je ne tombe pas sur l’entrefilet ci-dessous :

Bruno Gollnisch, le délégué général du FN, et Jany Le Pen, l’épouse du président du Front national, assis dans le carré des VIP tout près de Roland Dumas, ancien ministre des affaires étrangères de François Mitterrand : le spectacle, lundi 18 décembre au Zénith à Paris, était autant dans la salle que sur la scène. Dieudonné jouait son dernier sketch Dépôt de bilan.

Sabina Loriga ©

J’aimerais commencer, de façon télégraphique, par deux brèves prémisses.

Tout d’abord, les vérités historiques sont des vérités sensibles et vulnérables, peut-être plus fragiles que les axiomes ou les découvertes scientifiques. En effet, l’histoire occupe un espace moyen, hybride, qui touche la vie quotidienne, marqué par ce qui est précaire, indéterminé et changeant. Etant donné que tout ce qui s’est effectivement produit aurait pu être autrement, les possibilités d’interpréter le passé sont très larges.